On peut faire des pots de bien différentes manières.
Le modelage : consiste à partir d'un volume de terre et de le déformer, le creuser, rajouter de la terre si on n'en a pas assez.
Louis utilise cette technique rarement, surtout pour faire des bols irréguliers. J'utilise cette technique pour tout ce qui est sculpture.
Les colombins : technique ancestrale qui permet de faire de grandes pièces sans l'usage du tour en superposant des colombins
que l'on soude les uns aux autres.
C'est une technique vite apprise mais qui demande beaucoup de temps pour réaliser une pièce. Nous ne l'utilisons pas.
Le travail à la plaque : Il s'agit de réaliser des plaques de terre soit en l'aplatissant avec un rouleau à pâtisserie
entre deux baguettes de bois (pour une épaisseur régulière), soit en se servant de la croûteuse (laminoir à terre), ce qui va beaucoup plus vite.
Nous réalisons de nombreuses pièces à la plaque : assiettes et plats, vases, fonds de pots ovales ou rectangulaires.
Certaines pièces ont besoin d'être tournassées, d'autres pas. Le tournassage sert à parfaire la forme du bas de la pièce. Cela permet de l'alléger aussi. Il est indispensable pour les pièces ayant un pied (sauf techniques japonaises). Il se fait quand la pièce s'est assez raffermie, donc ni trop molle, ni trop sèche, soit en général le lendemain du tournage. Il existe plusieurs techniques pour permettre à la pièce de tenir à l'envers sur le tour. On utilise des mirettes ou des tournassins pour enlever la terre excédentaire.
Pour les pièces grès brut décorées, je grave le décor à main levée dans la terre crue à l'aide d'une grosse aiguille à coudre. Cela se fait après
le tournassage. Il ne faut pas rater le moment où la terre est à la bonne consistance. Heureusement, je peux emballer les pots dans un plastique si je ne
suis pas disponible pour faire les décors, cela les empêche de sécher.
J'ai de nombreux livres pour m'inspirer, réalistes ou stylisés : herbiers, aquarelles sur les fleurs de montagne ou de provence, décors
chinois, japonais, motifs ethniques ou celtiques... je suis toujours en quête d'un nouveau livre de motifs libres de droits.
Toutes les poteries doivent bien sécher avant de pouvoir les enfourner. C'est une étape qui peut s'avérer délicate, car si le séchage est trop rapide ou non uniforme, cela crée des tensions dans la terre, source de fissures, de casse, qui parfois ne sont visibles qu'après la première voire la deuxième cuisson. C'est pourquoi il vaut mieux ne pas faire les grosses pièces, comme les grands plats, en été. Quand cela arrive malgré tout, Louis doit couvrir les pièces pour ralentir le séchage. Autre écueil, si le séchage est insuffisant, la pièce peut éclater dans le four.
Il faut frotter chaque pièce avant de l'enfourner afin d'en enlever les petits défauts et d'en adoucir les bords si nécessaire. Cela se fait à l'aide d'une éponge humide ou d'un couteau. Cela crée des petites poussières de terre qui se détacheront des poteries après cuisson. Les poteries sont cuites entre 900 et 980°C au four à bois ou électrique. A ce stade, la terre est encore poreuse, ce qui permet à l'émail de tenir dessus.
Les poteries biscuitées sont toujours plus ou moins poussiéreuses, qu'elles attendent depuis longtemps à l'atelier,
ou qu'elles aient été cuites au bois, ce qui leur laisse des cendres dessus.
Avant de commencer l'émaillage, il est impératif de dépoussiérer chaque pièce à l'aide d'un gros pinceau.
En effet, la poussière empèche l'émail de bien y adhérer et peut causer des décollements d'émail pendant la cuisson.
Il faut aussi veiller à ne pas mettre de gras dessus, cela empèche également l'émail d'y adhérer.
Les émaux sont un mélange aqueux de différents composants qui ont des densités différentes et qui se séparent par décantation.
Avant de les utiliser il faut donc remettre en suspension homogène tous ces composants à l'aide d'un mélangeur à peinture.
Le décor sous émail :
Se fait sur les poteries où un décor a été préalablement gravé dans la terre crue. A l'aide d'un pinceau,
nous appliquons des oxydes métalliques sur la poterie biscuitée. Pour obtenir du bleu, on utilise de l'oxyde
de cobalt, pour le vert, l'oxyde de chrome, pour le marron, l'oxyde de fer rouge.
Il faut faire attention de ne pas déborder en dehors du décor gravé. Heureusement, on peut effacer les erreurs
à l'aide d'une gomme classique.
Il ne faut rien oublier non plus sinon car après cuisson, on ne peut plus rien modifier.
Ces pièces doivnet ensuite être recouvertes de couverte, un émail transparent, qui permet aux oxydes métalliques
de bien ressortir.
Les pièces émaillées unies :
on les plonge dans un bain d'émail. Comme les pièces biscuitées sont poreuses, l'émail y adhère sans problème. Puis l'eau
s'évapore et il ne reste sur les poteries qu'une couche de poudre. Il faut alors les manipuler avec précaution afin de ne pas enlever d'émail.
Les émaux ont des compositions différentes et sont plus ou moins fusibles (ils fondent, donc coulent plus ou moins sur la poterie).
On émaille donc les pots plus ou moins bas afin d'éviter au maximum que l'émail ne se retrouve sur les plaques en fin de cuisson,
car les poteries seraient collées sur les plaques.
Le décor sur émail :
J'émaille d'abord les pièces avec un émail à base de cendres de foin, puis je réalise le décor au pinceau à main levée, avec l'oxyde
de cobalt pour le bleu et l'oxyde de fer rouge pour le marron.
Le décor par superposition d'émaux :
Nous plongeons complètement ou en partie la pièce dans un émail contenant beaucoup de fer.
Sur cette zone émaillée, nous réalisons un décor avec de la réserve -cire de bougie fondue additionnée d'huile de parafine-,
ce qui empèchera le deuxième émail d'adhérer.
On émaille la zone qui n'a pas encore été émaillée et la zone où il y a la réserve avec un céladon.
Nous réalisons ce type de décor de préférence sur la terre de Saint-Amand car nous obtenons une zone claire
qui contraste avec une zone plus foncée. L'émail céladon est sombre sur la terre de Dordogne, riche en fer.
Louis remplit le four de manière à ce que les poteries soient le plus près possible les unes des autres, mais sans qu'elles ne se touchent (sinon elles se colleraient les unes aux autres). Les poteries sont posées sur des plaques d'enfournement recouvertes de protection de plaque -mélange d'alumine et de kaolin-, ce qui permet, le cas échéant, d'en décoller les pots sans les casser. Sur chaque plaque sont posées 3 colonnes d'enfournement, légèrement plus hautes que les poteries de l'étage, et qui supporteront les plaques supérieures. On fait donc des étages avec des pièces de hauteur similaire pour perdre le moins de place possible.
Il s'agit d'atteindre 1 300 °C pour que la terre se "ferme", c'est-à-dire qu'elle se vitrifie dans la masse.
La poterie est alors étanche même sans émail (contrairement à la faïence où c'est l'émail qui fait l'étanchéité, la terre
restant poreuse).
Nous contrôlons la température à l'intérieur du four à l'aide d'un pyromètre
(qui mesure la température de l'air) et de montres fusibles (qui nous permettent de connaître l'état de la matière)
en face desquelles nous avons laissé un regard dans le four pour pouvoir les contrôler pendant la cuisson.
Moment attendu de surprises, souvent bonnes, parfois mauvaises, et dont il faut tirer les leçons pour les prochaines cuissons.
Résultat de notre travail et fin d'un long processus de création.
Voici quelques photos prises à la fin de l'enfournement du four d'émail et après la cuisson. Cela illustre bien la transformation de l'émail par le feu.